
Une ordonnance au cœur de la gouvernance agricole.
Lors du Conseil des ministres du 23 avril 2025, le gouvernement ivoirien a adopté une ordonnance majeure portée par le ministère d’État, ministère de l’Agriculture, du Développement rural et des Productions vivrières. Cette mesure vise à étendre le champ d’application de la loi n°2013-656 du 13 septembre 2013 — jusque-là applicable aux filières coton et anacarde — à la filière karité.
Il ne s’agit pas simplement d’un ajustement technique, mais d’une réforme institutionnelle qui consacre une volonté politique claire : intégrer une filière stratégique, jusqu’alors peu régulée, dans un cadre de gouvernance consolidé et opérationnel.
L’ordonnance prévoit que les missions du Conseil Coton-Anacarde (CCA) — organe public chargé de la régulation, du suivi et du développement des filières coton et anacarde — s’appliqueront désormais aussi à la filière karité. En conséquence, le Conseil d’administration du CCA sera recomposé afin d’intégrer les représentants de l’interprofession du karité.
La décision du ministère de l’Agriculture, en concertation avec les ministères du Commerce, du Budget, du Portefeuille de l’État et des Eaux et Forêts, reflète une volonté de bâtir une gouvernance agricole plus intégrée et rationnelle. Plutôt que de créer une nouvelle entité pour la régulation du karité, l’État fait le choix de capitaliser sur une structure existante, déjà dotée d’une expérience éprouvée.
Ce choix permet :
– D’harmoniser les mécanismes de pilotage entre filières agricoles de rente ;
– D’accélérer la mise en place d’outils de suivi (fixation des prix, traçabilité, encadrement de la commercialisation) dans une filière jusqu’ici informelle ;
– De renforcer la coordination entre les différentes politiques agricoles nationales, dans une logique de mutualisation et d’efficacité.
L’intégration du karité dans le giron du CCA inaugure ainsi une nouvelle étape de la régulation agricole ivoirienne, centrée sur la structuration, la transparence et l’inclusivité.
Sur le plan économique, le karité dispose d’un potentiel important, tant sur le marché local que sur les marchés d’exportation — notamment dans les secteurs cosmétique, alimentaire et pharmaceutique. L’ordonnance du 23 avril entend répondre à ces faiblesses structurelles en inscrivant la filière dans un cadre national normatif, stratégique et incitatif.
Une opportunité pour les producteurs, les coopératives et les investisseurs locaux !
Mais au-delà des producteurs, cette ordonnance créera également de nouvelles opportunités pour les entrepreneurs et les investisseurs locaux. Le renforcement du cadre juridique et institutionnel viendra rassurer les acteurs du secteur et clarifiera les conditions d’investissement dans la filière. Elle permettra notamment l’émergence d’unités de transformation du beurre de karité, qu’elles soient artisanales, semi-industrielles ou industrielles. Elle encouragera aussi le développement de marques cosmétiques locales à base de karité, encore peu nombreuses à ce jour.
Par ailleurs, elle stimulera la mise en place de projets logistiques, de conditionnement et de packaging éco-responsables. Des programmes d’accompagnement verront également le jour, en particulier pour les coopératives féminines, à travers des dispositifs de formation, de certification et de traçabilité.
Enfin, bien que le Conseil des ministres ne l’ait pas encore précisé, cette dynamique pourrait favoriser un accès facilité à des financements publics ou privés ciblés sur les filières de rente.
L’extension de la gouvernance du Conseil Coton-Anacarde à la filière karité ne saurait produire ses effets durables sans une politique volontariste de valorisation du contenu local. Cette ordonnance ouvre un cadre favorable, mais c’est dans sa mise en œuvre que se jouera la redistribution réelle des opportunités.
Il est essentiel que les entrepreneurs ivoiriens soient placés au cœur du développement de cette filière.
Le contenu local ne doit pas être une option. Il doit devenir la colonne vertébrale de cette réforme. C’est à ce prix que la filière karité pourra devenir un levier de souveraineté économique, d’autonomisation sociale, et de création d’emplois durables en Côte d’Ivoire.
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